LE SERVICE MILITAIRE (2)
(code recherche : SOUMIL)
Dans le premier épisode, nous arrivons à Tahiti et logeons au Grand Hôtel de Papeete, c'est le 24 juillet 1963.
Je viens de retrouver dans mes archives, les lettres que j'écrivais à ma mère depuis mon départ d'Avignon. Cela va me faciliter la tâche, je n'ai plus qu'à copier. Donc, revenons une semaine en arrière...
II - Voyage au bout de la nuit
Vers la fin juin 1963, je quitte Avignon pour Rouen. Après un voyage agréable jusqu'à Paris, la traversée difficile de Paris et à nouveau le train jusqu'à Rouen, me voilà à la caserne de Rouen où je retrouve un ami de Carcassone qui part avec moi pour la Pacifique (son nom me reviens, Escudier). A Rouen, l'officier responsable nous met en permission jusqu'au 17 juillet et nous annonce que nous embarquerons le 22 juillet à Orly, direction les îles Gambiers ( ? cela, je l'avais complètement oublié).
(Larzac, mai 1961, il y a encore de la neige)
Je passe donc 15 jours à Montpellier ; cela sera mes dernières balades dans la région dont 8 jours avec mes amis dans une vieille maison forestière sur le Larzac, aimablement prêtée par le vieux garde forestier que nous fournissons en livres scolaires, héritage de notre période au lycée (il passe ses journées à lire de l'espagnol et du latin).
Ma lettre du 22 juillet, jour de notre départ d'Orly :
"En vol, 22 juillet 1963, 19h30 à Paris
Chère maman,
Je pensais te voir dans la salle d'attente au rez-de-chaussée, mais nous sommes restés très peu de temps, de 15h30 à 16h. Je vous ai vu sur la terrasse, au moment de prendre l'avion.
L'avion est un DC8 : confort sensationnel. Je t'enverrai le livret de description pour que tu puisses en juger. Menu de ce soir : Martini, vin rouge de Bordeaux, tomates portugaises, lotte à la parisienne, volaille sauce ivoire, riz pilaf, tartelette aux fruits, café. Le long du voyage : bonbons, cartes postales, papiers à lettre, je t'enverrai les menus.
J'aurais voulu te dire à Orly que nous passions par l'orient. Je m'arrête car voici Athènes, 21h10. Après Athènes, ce sera Beyrouth, Karachi, Singapour, Saigon, Darwin, Sydney, Nouméa, Fidji (Nandi) et, enfin, Papeete...."
Ma lettre du 24 juillet :
"Darwin, le 24 juillet 1963
Chère maman,
il est 2h du matin (18h15 à Paris), nous venons de faire escale à Darwin, Australie du nord. Ici, nous avons droit à une vérification des vaccins et au passage de la cabine de l'avion avec du DDT. Le voyage se passe toujours bien, hier soir nous avons fait un très bon repas.
Prochaine escale, Sidney en Australie du sud. Ensuite Nouméa, une île du Pacifique et Papeete à 11h53, heure locale (1h à Paris)..."
(Aéroport de Singapour)
Ma lettre du 25 juillet 1963 (terminée le 26):
"Papeete, le 25 juillet 1963
Chère maman,
Tout d'abord, la fin du voyage :
- Escale à Sidney avec petit déjeuner style anglais (comme à Karachi), il est 8h, il fait 7° (ici, c'est l'hiver).
(Aéroport de Sidney)
- Escale à Nouméa (19°) et repas dans un restaurant en montagne, proche de l'aéroport de Tontouta.
- Escale à Nandi, île Fidji à 19h.
- Arrivée à PAPEETE à 0h15 le 24 juillet (14 heure en France). L'aérodrome est moche (hangar) mais par contre, beaucoup d'ambiance : fleurs, musiciens, danses, beaucoup de monde...), il faisait 23°.
(Aéroport de Tontouta)
Le 26 juillet, nous nous installons dans un camp de toile sous les cocotiers à 500 mètres de la plage. Avant, nous avons changé notre argent (35.000 = 6.545 francs d'ici).
Nous sommes assez bien installé (lit de camp, sac de couchage, matelas pneumatique, moustiquaire, lumière, table), la nourriture est bonne. Le seul ennui, nous sommes avec la Légion qui est très disciplinée (je changerai rapidement d'avis), mais enfin, nous avons réussi à garder nos avantages (sorties et entrées à n'importe quelle heure).
(Papeete 1963, carrefour rue Colette, rue des écoles)
L'île est très belle, beaucoup d'arbres, de cocotiers, de fleurs, beaucoup de musique, de chansons, de danse... Exceptés les fleurs et les arbres, Papeete est assez moche : Quelques grandes maisons anciennes (un étage), des maisons en bois, des paillotes (là aussi, je changerai rapidement d'avis)...
Je suis sorti ces deux derniers soirs. Il y a trois ou quatre endroits où l'on danse : orchestre typique, colliers et couronnes de fleurs, twist et tamouré, tout le monde boit de la bière (mais très peu).
Ici, il y a un grand nombre d'américains et de chinois. Excepté les militaires, le nombre de français se compte sur les doigts (j'en ai vu encore qu'un).
Il fait très bon, aujourd'hui un peu de vent, on dirait un été en France.
..........
J'oubliais de te dire que les noix de coco, ce n'est pas terrible, ça désaltère sans plus ; on boit que ça à longueur de journée.
A propos des dates, j'ai hésité longtemps avant de savoir quel jour on était, car nous avons passé 3 jours dans l'avion, mais nous sommes arrivés le 24 ici (difficile à comprendre car à Nouméa, c'était le 25)."
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Certains pourront être surpris par mes premières impressions de Tahiti et, en particulier, de Papeete, mais je vous rappelle que nous venions d'arriver depuis seulement deux jours... et en plein les fêtes du Tiurai (juillet).
(Photo du Tiurai de 1975 qui rappelle à peu près la même ambiance)
Je dois dire que lors de notre première sortie à Papeete, alors que nous logions au Grand Hôtel, nous avons été "emballés" par tous ces dancings, buvettes, baraques de jeux, restaurants "veau à la broche", le long des quais de Papeete. Le soir nous nous promenions le long de ces baraques avec, en poche, des tickets de chaque dancing (5 francs CFP si je me souviens bien). Quand nous rencontrions une vahine qui souhaitait danser, nous rentrions sur la piste de danse la plus proche avec notre ticket d'entrée pour un couple. Nous crûmes naïvement que cela durait toute l'année... (mais ça, je ne l'ai pas raconté à ma mère )
à suivre....